Du 10 au 20 Juin, nous étions en Namibie dans une ferme située
à 1h30 au sud de l’aéroport de Windhoek. Il est assez surprenant
d’atterrir à cet endroit qui est situé en plein désert.
Impossible de trouver des habitations aux alentours. Par contre, nous avons
eu une petite angoisse à l’arrivée, en ne voyant pas nos
arcs sur le tapis roulant. A la place, nous sommes invités par la
police locale à les suivre dans leur petit bureau. Nos mallettes
sont là et l’on nous demande gentiment de bien vouloir les ouvrir.
Simple contrôle de routine, tout va bien, ouf...Le site de chasse
est superbe, les lodges sont très confortables, les gens charmants,
et les animaux très sauvages et de bonne qualité. La chasse
s’annonce plutôt difficile. Il y a eu de la pluie quelques jours
avant notre arrivée, il y a beaucoup de vent et il fait très
froid. Au bout de trois jours d’approche, dans un paysage semi désertique
parmi des animaux très méfiants, il nous fallait changer
de méthode. Nous sommes donc passés à l’affût
près de points d’eau ou de salines. Après deux jours d’affût,
je peux tirer un jeune Koudou. Après que l’animal soit arrivé
à distance de tir, j’ai attendu plus de 30 minutes pour pouvoir
tirer. L’animal buvait, mangeait, écoutait, sentait mais n’offrait
pas d’angle de tir satisfaisant (mon guide a failli mourir d’immobilisme
aigu ...). Enfin, l’animal se présente de coté. Un parfait
broadside shoot comme disent nos amis Anglophones. Je lève mon bras
lentement et arme. Au moment où j’aligne ma mire sur son cœur, il
tourne la tête dans la direction de l’affût, je ne peux plus
tirer ni bouger. Je me concentre sur son cœur, je ne vois plus l’animal
qu’en vision périphérique. Le temps passe si lentement, il
ne bouge pas et les 75# de mon arc deviennent difficiles à tenir.
Encore quelques secondes et je serais obligé d’abandonner. Soudain,
il tourne la tête et je décoche à 30m dans un angle
idéal. . Ma flèche a traversé en plein milieu du cœur
et nous avons retrouvé l’animal à 50m. Après ce tir,
je partais seul dans les affûts. Le soir nous avons dégusté
le foie. C’est une tradition en Namibie, lorsque l’on tire un animal pour
la première fois, nous devons manger le foie. Il est cuit pour toutes
les antilopes sauf le Springbok qu’il faut manger cru. Le Kudu va nous
fournir de la viande fraîche pour tout le séjour de chasse.
Nous allons le manger en steak, en hamburger, en hachis Parmentier, en
saucisse, en biltong. La viande est absolument délicieuse. Thierry
et moi nous nous sommes gavés de cette viande succulente. Les Namibiens
sont de très gros mangeurs de viande et ils connaissent de multiples
recettes pour ne pas perdre un seul morceau de l’animal.
Deux jours plus tard, à un point d’eau, une troupe de Gemsbuck
arrive. Une quinzaine d’animaux sont à une vingtaine de mètres
de moi, c’était splendide. Je repère une très belle
femelle que je tire de ¾ arrière au moment où elle
pivote pour quitter le point d’eau. Ma flèche traverse le foie,
le cœur et ressort pour tomber 20m plus loin. La bête fait une vingtaine
de mètres en marchant puis s’allonge. La troupe, quant a elle n’a
pratiquement pas bougé. Les minutes passent lentement, mon animal
dodeline de la tête mais ne se couche pas. Que le temps est long
dans ces moments là. Vingt minutes après le tir, elle se
relève, mon cœur passe à 200 pulsations à la minute.
Elle marche lentement une quinzaine de mètres et s’allonge à
nouveau. Je ne vois plus que ses longues cornes, se découpant sur
le bleu de l’horizon. Soudain, je ne vois plus rien. Cela fait 30 minutes
que j’ai tiré, la troupe est partie tranquillement. Je sors de mon
affût et marche très lentement vers le dernier point de chute.
J’ai encoché une autre flèche mais cette précaution
me parait bien ridicule face à la puissance et aux cornes d’un Gemsbuck.
Je la trouve enfin à moins de cinquante mètres de l’affût,
la nature m’offre ce magnifique animal. Le trophée fait 78’’ ¼
(la médaille d’or est à 204 cm) et me permet de gagner une
médaille d’argent selon les standards NAPHA. Le propriétaire
et le chasseur pro sont ravis, et moi donc.
Les jours suivants sont très difficiles beaucoup de vent et
surtout un froid glacial. Nous étions prévenus mais nous
ne nous attendions pas à une telle température. La nuit dans
la tente, il ne fait vraiment pas chaud surtout quand on oublie de se mettre
dans le sac de couchage et qu’un lion dort à coté de vous
(voir Thierry pour les explications) !!! Heureusement que les soirées
autour du feu sont extraordinaires. Ce soir, c’est Dirk, le chasseur pro
qui nous fait la cuisine. Nous avons droit au Combomili, un plat traditionnel.
La recette est assez simple. Vous faites un feu, vous prenez une bonne
vieille marmite et vous faites mijoter la viande, les légumes, la
soupe. Ajouter à cela du maïs et vous avez un dîner en
brousse extraordinaire.
Nous arrivons donc transit à notre dernier jour de chasse. Je
suis frigorifié dans un affût depuis des heures sans rien
voir. Tout à coup vers 16h, un blesbock arrive, puis une troupe
de Gemsbuck (la même ???), puis un superbe mâle springbok mais
trop loin et pour finir une troupe de Warthogs. La femelle, le mâle
et deux petits. La femelle est magnifique, ses trophées sont immenses
et sont superbement formés en demi cœur. Le mâle est lui aussi
superbe, ses défenses sont magnifiques. Il est à quinze mètres
de moi mais je ne peux pas le tirer. Je ne le quitte plus des yeux, prêt
à armer. Il n’arrête pas de boire, de grogner et de sentir.
Soudain il s’arrête et m’offre un angle excellent, ma fenêtre
de tir doit faire 10 sur 10 cm. J’arme, je vise et tire très rapidement
avant qu’il ne bouge, il est 16h30. Ma flèche le traverse, se plante
dans l’eau et effraie la troupe. Tout est allé si vite que je n’ai
pas pu voir mon impact mais je suis sûr que ma flèche est
mortelle en le voyant partir. La femelle et les petits partent vers la
gauche en trottinant dans leur allure caractéristique d’alerte.
Le mâle quand à lui part vers la droite, plus lentement. Soudain,
il change de direction et repasse devant moi à une trentaine de
mètres. Je vois enfin mon impact. La plaie saigne abondamment, poumon
ou cœur, je ne sais pas encore. Je le suis des yeux à travers mes
jumelles. Il marche lentement et s’enfonce dans le bush. Je le perds de
vue. Je note sa direction de fuite à la boussole et attends les
trente minutes réglementaires. J’angoisse car la nuit tombe vers
17h30 et trouver un animal gris dans la pénombre serait un exploit.
Le Warthog est un animal extrêmement résistant, je sais que
si ma flèche n’a pas traversé le cœur ou les deux poumons,
je ne le retrouverai pas, les secondes et les minutes s’égrainent
lentement. Au bout de 25 minutes, je décide de sortir car la luminosité
baisse rapidement. Je préviens mon guide et lui laisse une flèche
faite de branches au sol pour lui indiquer la direction de ma recherche.
Je prend tout mon équipement, aligne ma boussole et pars sur ses
traces. Arrivé au dernier endroit où je l’ai vu, je ne trouve
aucune marque. Nous sommes dans une zone semi désertique les traces
de pas sont nombreuses mais je ne trouve pas de sang. J’ai beau remonter
la piste je ne trouve rien, la luminosité devient trop faible. Mon
guide m’a rejoint et cherche avec moi sans réussite. Cela fait 40
minutes que j’ai tiré et il fera bientôt trop noir, l’angoisse
! Soudain mon guide entend un râle pas très loin. Les Warthogs
poussent toujours un râle avant de mourir. Nous fonçons dans
la direction mais ne voyons rien. C’est à l’odeur que nous allons
le retrouver couché derrière un buisson. Quel soulagement,
il va faire nuit dans peu de temps. Nous sommes loin du véhicule
et il est trop difficile de porter l’animal. Nous le traînons jusqu’à
un point plus accessible au 4*4. Mon guide part le chercher et j’attends
ici son retour. Je fais un feu pour signaler ma position et éloigner
les prédateurs nombreux dans cette zone. La nuit est complètement
noire ce soir, je suis calme maintenant et profite de ces dernières
heures de chasse. Arrivés au camp, nous mesurons les trophées
et là une surprise très agréable nous attend puisqu’il
mesure 38’’ ¼ et est classé médaille d’or. C’est le
premier Warthog médaille d’or tiré ici, tout le monde est
fou de joie. Comment mieux finir cette chasse ?
Thierry a eu moins de chance, le recurve est un arc difficile mais
il a fait de jolies photos.